Morgane BRAVO, Fondatrice du HUB «DIGITAL DIPLOMACY» : «POLITIQUE & SOCIAL NETWORKING».

Morgane BRAVO, Fondatrice du HUB «DIGITAL DIPLOMACY» : «POLITIQUE & SOCIAL NETWORKING».
2009 Création du HUB. From Paris, France. *Morgane BRAVO, Avocat de formation, études & expérience Diplomatique... Passionnée du Web depuis 1998, Geek 2.0, #Europe, #EU, #UE, #EURO, #ZoneEuro #Gov2.0 #Digital Diplomacy #Diplomatie Numérique @EcologieI #G20 #Gouvernance, #Opendata...*

jeudi 22 décembre 2011

*Entreprise 2.0 : la nouvelle arlésienne ?...*

Proximité client, agilité organisationnelle et collaborateurs motivés : voilà les trois rêves de l’entreprise moderne qui sait utiliser les technologies numériques à son avantage et qu’on appelle "entreprise 2.0". Tout le monde en parle ! Pourtant personne ne la voit...

Un nouvel Eldorado
Grâce à des processus fluidifiés par la technologie, l’entreprise 2.0 voit ses collaborateurs s’organiser et se reconfigurer à la vitesse de l’éclair, par-delà les lourdeurs organisationnelles, pour satisfaire les désirs - même non exprimés - de clients devenus à ce point intimes et fidèles qu’on pourrait les appeler des amis. Du moins au sens Facebook du terme.
Preuve de l’attractivité de ce modèle : la totalité des entreprises du CAC 40 dispose aujourd’hui de sa page Facebook. Des pages Facebook où est organisée une véritable chasse aux "fans". Cadeaux, jeux et offres "privilège" y jouent le rôle traditionnel que l’échange de verroteries tient depuis des temps immémoriaux dans les relations d’amitié, du moins celles qui ne sont pas dénuées d’intentions mercantiles. Mais la présence sur Facebook ne fait pas l’entreprise 2.0.
Hormis cet activisme "facebookien" généralisé, l’entreprise 2.0 n’est pas une réalité. La très grande majorité des entreprises reste à la porte de cette terre paradisiaque. Il faut dire que la réalité de ces entreprises est bien différente, engluée qu’elles sont dans une informatique taylorienne héritée de quarante ans d’investissements considérables dans ce qu’on appelle les systèmes d’information, à la poursuite d’un autre rêve : l’entreprise rationalisée et optimisée par l’ordinateur.
Bref, on l’aura compris, développer une organisation fluide, proche des clients et valorisant les initiatives de terrain prises par des collaborateurs motivés et responsabilisés est peu compatible - pour ne pas dire antagoniste - avec une informatisation procédurale qui séquence dans les moindres détails les avancées des tâches au fur et à mesure.
C’est en ne comprenant pas la nature profonde de l’informatique sociale (dite 2.0) - que les entreprises s’obstinent à prendre pour une "techno de plus" -, que les entreprises échouent dans leur désir de changement. La tête rêve de fluidité, de collaboration, d’ouverture et de confiance généralisée alors que les réflexes s’enracinent dans la capitalisation, la concurrence, l’individualisation, le contrôle et la normalisation.  
The power of us : la nouvelle donne
Lorsque nous avons tenté de décrire dans les colonnes des Échos en 2005, cet incroyable phénomène de mobilisation du collectif grâce aux outils du web, en nous appuyant sur un article fondateur intitulé "The power of us", nous avons parlé d’une "nouvelle économie". Une économie fondée sur une nouvelle ressource, inépuisable celle-là, la collaboration entres les individus et les groupes (communautés). Un incroyable retournement de balancier. Au moment où le capitalisme boursier triomphant semblait devenir l’ultime modèle, où même les banques et assurances issues du mouvement mutualiste finissaient par s’y conformer, on nous annonçait le retour d’une utopie collaborative.
Même débarrassée de tout relent collectiviste, cette utopie libérale-libertaire qui se développait dans la Silicon Valley depuis plus de trente ans promettait de réenchanter le monde. Pensez donc, on en venait à prendre pour possible de faire émerger une encyclopédie universelle à partir des contributions volontaires, gratuites d’individus non experts. Oui, assurément, Wikipedia et d’autres furent bien un séisme !
Deux modèles d’organisation, deux types d’entreprise ?
S’il est croustillant de voir, en période boursière chahutée, les entreprises issues ou du mouvement mutualiste (banques, assurances…) ou de l’économie sociale et solidaire s’apercevoir qu’elles pourraient trouver un avantage à réinvestir leurs fondamentaux coopératifs au travers du "2.0", il est en revanche surprenant de constater que les entreprises classiques (au management prônant la performance individuelle) se ruent vers le même modèle sans s’apercevoir qu’il n’est pas fait pour elles, sauf à changer d’identité. De la même manière qu’une entreprise naît low cost, mais ne le devient pas ; une entreprise naît sociale, elle ne le devient pas, sauf à changer de nature.
Les efforts des entreprises classiques vers le 2.0 ressortent pour l’instant de l’action cosmétique. Gageons que cet état des lieux n’est pas près de changer. L’informatique sociale (2.0) n’est naturelle que pour les entreprises sociales. Les entreprises du CAC 40 veulent-elles devenir sociales ? Voilà une question essentielle avant toute conversion au "2.0".
Nous sommes face à des modèles managériaux antagonistes. Antagonisme qui se retrouve dans l'informatique. L’informatique 2.0 est aux antipodes de l’informatique 1.0. Facebook n’a rien à faire avec SAP ! Croire le contraire condamne à une expérience longue et douloureuse. Une expérience d’autant plus inutile que le terme "2.0" est trompeur. Il fait penser à une supériorité évidente par rapport au modèle 1.0.
Si la démonstration est faite pour certaines réalisations (Wikipédia est démonstratif à cet égard), elle est loin d’avoir été démontrée dans tous les pans de l’économie. Par ailleurs, les défauts du modèle collaboratif sont connus. Si nous espérons tirer des collaborations spontanées entre collègues au sein de communautés plus ou moins virtuelles une performance collective inégalée, notre naïveté pourrait bien nous ramener très vite aux guerres de chapelles, au jargon professionnel, au bizutage des nouveaux… dont l’histoire managériale a pourtant gardé la mémoire. L’évolution vers davantage de collaboration n’est pas un chemin semé de roses. Ni pour les entreprises sociales, ni pour les autres.

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